Dix ans, c'est un bilan positif, 77 artisanes à Majunga, une vingtaine à
Ambatorao, Sainte-Marie et une vingtaine aussi dans la région de
Fianarantsoa. L'Association contribue à faire vivre 410 personnes.
Organisation
Depuis
2013, Rouge Beauté a passé la main pour le fonctionnement des
boutique. Les outils de gestion que nous avons créés en
concertation, permettent aux femmes de gérer elles-mêmes leurs
gains au sein d’une association, Mena Tsara. La patente est
désormais à ce nom.
Au
prix de revient d’un produit (matière + main d'oeuvre) que
récupèrent intégralement les artisanes, 20% sont ajoutés pour
constituer le prix de vente. Ces 20% sont répartis comme suit :
10% reviennent à la vendeuse et 10% paient les menus frais et les
impôts. Les artisanes achètent leur matière première et toutes
leurs fournitures à la coopérative d’achat qu'elles gèrent.
Elles sont maintenant autonomes pour la plupart. Nous avons créé un
système particulier pour les artisanes qui ne sont pas prêtes
à anticiper leurs achats.
Origines
ethniques : Au sein de l'Association les ethnies sont
diverses, Betsimisaraka à Sainte Marie, Betsileo à Fianarantsoa. À
Majunga, les femmes du groupe Rouge Beauté sont issues de six
ethnies différentes, certaines viennent de très loin : les Merina à
Antananarivo, les Betsileo à Fianarantsoa, les Betsirebaka à
Manakara au sud-est du pays, les Tsihemety à Port Berger au
nord-centre, les Sakalava de la région de Majunga et une comorienne…
Cette diversité enrichit les pratiques.
93%
des femmes habitent dans les villages
environnants et 7% sont des citadines.
environnants et 7% sont des citadines.
Les
situations familiales sont souvent difficiles (familles
monoparentales, veuvage, divorce, chômage du mari, alcoolisme…).
Niveau
scolaire : 84% n’ont pas dépassé le niveau primaire (31%
des femmes ont des difficultés à écrire, 12% sont analphabètes),
10% sont allées au collège, 6% ont dépassé le niveau collège et
la bonne nouvelle c'est que parmi les enfants des artisanes Rouge
Beauté, 5 jeunes filles sont à l'Université et participent aux
activités de l'association.
Répartition
des âges : 10% des femmes ont moins de 20 ans, 26% ont
entre 20 à 30 ans ; 34% entre 30 et 40 ans ; 17% entre 40
et 50 ans ; 9% entre 50 et 60 ans et 4% de plus de 60 ans.
Formations
La formation est le pilier de tout projet de développement et constitue un investissement à long terme.
La formation est le pilier de tout projet de développement et constitue un investissement à long terme.
L'effectif
augmente sans cesse, nous avons construit le site de Majunga en 2011
et 2013, le site de Sainte Marie en 2015, à
Fianarantsoa, nous suivons une vingtaine d'artisanes. Les
nouvelles recrues ont besoin de formation de base et les anciennes
doivent consolider et étendre leurs acquis, sans formations
régulières le groupe régresse très vite.
Les formations continues et les grands plans de formation intensive que nous avons mis en place en 2014 à Majunga et en 2018 à Sainte Marie ont été décisifs pour le développement de Rouge Beauté, c'est grâce aux formations que l'Association s'est si bien développée. Nous devons continuer, aussi, nous projetons de nouveaux un grand plan de formation : techniques artisanales, design et informatique.
Formation
Design
Toute
l'action de Rouge Beauté repose sur le développement de la
créativité. C'est l'objectif premier de l'Association, son
but est de mettre en valeur et diversifier sensiblement la production
artisanale locale afin d’en accroître la diffusion. Rouge Beauté
vise l’autonomie financière de ces femmes, qu'elles puissent
produire, dans la durabilité, un artisanat créatif et original.
La
difficulté, c'est qu'à Madagascar, il n'y a pas d'enseignement
créatif à l'école, de plus la société étant plus axée vers le
passé que vers l'avenir, la tendance en matière d'artisanat est de
copier et répéter plutôt que de créer ce qui sature le marché.
Les
formations design aident
chaque artisane a trouver sa propre expression à travers la
découverte de nouvelles techniques qui enrichissent ses acquis.
Grâce
aux formations design,
les artisanes apprennent la notion de « propriété
intellectuelle », les modèles appartiennent toujours à une
femme ou à un groupe si la découverte est collective.
Cela
change tout le rapport au travail. À Madagascar, ce n'est pas
l'objet qui a un prix mais le client par le système du marchandage.
En développant leurs propres modèles et en leurs attribuant un coût
de revient, les artisanes Rouge Beauté, retrouvent le sens du
travail bien fait qui a une valeur propre. C'est une valorisation du
travail et donc de la personne qui l'exécute.
Pour
un bon designer, la forme naît de la bonne utilisation des
techniques les plus adaptées aux qualités intrinsèques de la
matière. La
formation design s'appuie donc sur l'observation de la matière
première et l'étude de toutes les techniques de transformations
naturelles à disposition.
La
formation comporte beaucoup d'observation et beaucoup de recherches dont les résultats se révèlent au cours de concours de créativité
ponctuels, environs tous les deux mois.
Les
femmes ont besoin de s'ouvrir au monde extérieur afin de parfaire
leurs connaissances professionnelles mais aussi continuer à se
cultiver. C'est très important pour ces personnes qui, bien souvent,
ont été très peu scolarisées. Cela représente une seconde chance
pour elles.
Formation
aux recherches sur Internet :
l'ouverture culturelle et artistique et utilisation des réseaux
sociaux sont indispensables pour promouvoir la diffusion des
produits, il s'agit d'une initiation pour les unes et d'un
renforcement pour les autres.
Formation Gestion : le groupe de
Majunga est devenue autonome pour gérer les ventes à la boutique
mais il reste beaucoup à faire en gestion des commandes,
d'autant plus que la personne qui en était responsable est partie
pour raison professionnelle. Nous devons donc former 3 artisanes à
la gestion des commandes et renforcer leurs connaissances en
bureautique. À
Sainte-Marie, l'acquis est encore trop faible pour les 2 responsables
du groupe et à Fianarantsoa, tout reste à faire.
Offrir un accès au numérique aux femmes artisanes. Une formation sans
accès numérique continu serait un frein, voire un fiasco pour
l'ancrage des connaissances nouvellement acquises, les artisanes
doivent pouvoir pratiquer tous les jours.
Les
équipements : grâce,
aux subventions et dons, nos sites sont équipés en matériel
informatique sauf celui de Fianarantsoa. À Majunga, il nous faut
remplacer l'imprimante qui est irréparable.
L'expérience
de l'Échange des savoirs entre Fianarantsoa et Sainte Marie a été
un tel succès l'an passé que nous avons commencé généraliser
cette pratique cette année entre les 3 sites. Nous avons constaté que les savoir-faire sont différents et complémentaires dans ces
trois régions alors que les matières premières, essentiellement
des fibres naturelles, possèdent des qualités similaires. Il paraît
donc judicieux de partager ces différentes techniques afin
d'enrichir les pratiques locales. Cette
année, quatre sessions ont été programmées :
Dix
artisanes de Majunga sont allées à Sainte-Marie en novembre.
Huit
artisanes de Sainte-Marie étaient cette semaine à Fianarantsoa.
Dix
artisanes de Sainte-Marie se rendront en avril 2020 Majunga.
Si
les techniques sont échangées, les modèles ne le sont pas. Grâce
aux formations Design, les artisanes ont appris la notion de
« propriété intellectuelle ». Les modèles
appartiennent toujours à une artisane ou à un groupe si la
découverte est collective.
Ces échanges dépassent le domaine professionnel; ils sont aussi
l'occasion d'une ouverture vers d'autres cultures, d'autres coutumes,
la découverte de leur pays que souvent les artisanes ne connaissent
pas. C'est aussi un moment privilégié pour souder les liens entre
collègues.
Les
deux dernières sessions ont été de grands moments, le voyage est
déjà toute une aventure ! En novembre, l'accueil
à Ambatorao, Sainte-Marie a été formidable, une occasion aussi de
fêter les 10 ans ensemble. Les artisanes d'Ambatorao ont transmis la
technique du chapeau raphia natté très fin, la technique garaba
pour les abat-jour et la manière de faire les fonds de corbeilles 4
points pour une meilleure assise. Les artisanes de Majunga ont
surtout transmis la tissage avec de nouveaux motifs, le tressage à
7, 9, 11 et 13 brins mais aussi une nouvelle façon de concevoir les
poufs.
Cette
semaine, les artisanes de Fianarantsoa ont transmis le nattage
ajouré, en semi-sphère, en galette et le motif pied de poule. Les
artisanes de Sainte-Marie ont transmis, le tressage 5 brins cousu, la
fabrication de cornets et le point garaba...
Akanin'Ankizy,
un nid pour les enfants.À
Madagascar, il y a une grande tradition d'entraide familiale qui
règle bien des problèmes mais Mahajanga est une ville de grande
immigration et certaines femmes se retrouvent seules, elles ont
beaucoup de mal à élever leurs enfants tout en travaillant.
Depuis
fin 2016, nous avons créé cette nouvelle structure afin de venir en
aide à ces enfants défavorisés, en ce moment la structure
accueille 5 enfants en grandes difficultés. Ils sont ravis ;
Yvonne et Julietta sont extras avec eux : jeux, goûter, repas,
soutien pédagogique… l'Association prend également en charge les
frais de scolarisation de nos petits pensionnaires qui ne sont pas
coupés de leurs familles, c'est très important.
Akanin'Ankizy
propose aussi du soutien scolaire et des activités ludiques, chant,
danse, théâtre aux autres enfants de l'Association.
Un
bilan bien positif donc pour ces dix ans mais j'ai été triste
d'apprendre en revenant de France, en septembre, qu'une des artisanes
de Rouge Beauté était partie travailler comme employée de maison
au Koweït.
Les
autorités malgaches ont pourtant suspendu l'envoi d’employées de
maison dans les pays du Golfe depuis 2013. Mais des dizaines de
femmes parviennent à s’y rendre chaque année,
la plupart du temps, elles sont très mal traitées mais l'appât du
gain fait disparaître la prudence.
À suivre sur ce blog et toutes les semaines sur FaceBook :
https://web.facebook.com/rougebeautemadagascar/Rosemarie Martin
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