Rouge Beauté œuvre pour le développement de micros-écoles d’arts appliqués à la production artisanale locale réalisée par les femmes à Madagascar. L’Association a choisi comme sites d’activité trois régions : la Haute Matsiatra, la Boeny et l’Analanjirofo pour y dispenser une formation artistique afin de développer la créativité. Son but est de mettre en valeur et de diversifier sensiblement la production artisanale locale afin d’en accroître la diffusion. Rouge Beauté vise l’autonomie financière de ces femmes qui peuvent maintenant produire, dans la durabilité, un artisanat créatif et original au sein de structures légères.
Me voilà encore de retour à Mahajanga mais, cette
fois-ci, je suis allée faire de la formation auprès d’associations de femmes
artisanes à Fianarantsoa qui travaillent le taretra, sisal et le forona, sorte de jonc.
En revenant, je me suis arrêtée à Antsirabe, pour la
rencontre annuelle France Volontaire à Madagascar, la plupart des participants
avaient, comme moi, le statut de VSI (Volontaires de Solidarité Internationale).
C’est vraiment intéressant de partager des expériences, j’ai fait de belles
rencontres, des actions communes pourront peut-être en découler.
Nous venons de passer un week-end de Pâques très
animé, c’est une tradition à Madagascar que d’aller pique-niquer le lundi de
Pâques, tous les gens de la ville viennent au bord de la mer, beaucoup marchent
à pied, certains arrivent dès la nuit. Hier, il y avait un embouteillage
monstre à Petite Plage où se déroulait également la régate : Majunga fait son
tour du monde, ce sont les pêcheurs qui font la course, leurs voiles
représentent un pays, une région du monde ou encore une association, c’était
formidable !
À Rouge Beauté, Mahajanga, il y beaucoup d’activité
en ce moment, les artisanes sont en plein boom à cause des vacances de Pâques
qui arrivent avec, nous l’espérons, de nombreux tourismes.
Nous sommes aussi en plein chantier : les sanitaires,
enfin et les grilles de sécurité sont en cours d’installation. Nous
rêvions bien d’un monde sans grille mais l’Assurance n’était pas d’accord. Ces
travaux ont été réalisés grâce à une belle subvention du Rotary Club. Il s’agit
d’une AIPM (Action d’Intérêt Public Mondial), fruit de la collaboration entre
le club de Nantes, le club de Mahajanga, un club anglais et le Siège,
La première tranche de travaux, le gros œuvre, avait
été prise en charge par la Fondation d’entreprise Total et LPSA qui s’occupe de
la logistique pétrolière à Madagascar. Le Rotary Club, finance, en plus des
travaux déjà cités, de l’équipement informatique et de communication, des
machines à coudre, des métiers à tisser, de l’outillage, du mobilier, et un
gros plan de formation en vannerie, broderie, chapellerie, couture, informatique…
Des formations en crochet, tissage, tressage du
raphia et tressage du satrana, sorte de palmier, sont prodiguées depuis le 6 janvier,
nous attendons pour bientôt les ordinateurs et les machines à coudre. Le
matériel de bureau et pédagogique est déjà arrivé, les stores aussi. De
nouveaux métiers à tisser sont en chantier, ensuite ce sera le tour du
mobilier, nous manquons cruellement de tables et de rangements. Enfin, nous
pensons que fin juin tout sera fini à part quelques formations, peut-être.
À l’heure où j’écris ces mots, il y a encore une
coupure de courant, c’est presque tous les jours deux, trois, quatre heures,
voire plus. Soupire !
Me voilà revenue de la brousse depuis ce matin, déjà
quinze jours que je suis à Sainte Marie, la plupart du temps à Ambatoroa, dans
le Nord. La journée du 8 mars s’est très bien passée, toutes les femmes de
l’Île s’étaient donné rendez-vous à Ambatoroa pour défiler en lambahoany colorés en chantant sur un
fond de percussion. Pour moi, grande impatiente dans le pays du moramora, les discours ont quand
même été… longs. Mais bon, le bal de la veille, les défilés, la bonne humeur,
la musique, les échanges… les femmes sont pleines d’énergie. Cette journée m’a
aussi permis de rencontrer la plupart de nos partenaires.
En parlant de partenariat, Rouge Beauté vient de
s’affilier à l’Office du Tourisme de l’Île qui fait peau veuve. Un grand projet
de Charte de Tourisme Durable est en train de s’échafauder avec tous les
acteurs de l’économie touristique. Pour l’instant, c’est le stade de l’état des
lieux, ensuite seront définis les critères de cette charte puis viendra le
temps de la mise en place et le suivi, tout ça va prendre au minimum un an.
Nous avons reçu, à Rouge Beauté, la visite du chargé
de mission pour l’étude préalable. Si cette charte se met en place nous
pourrons être une des étapes de circuits touristiques. Il y a encore beaucoup à
faire à Sainte Marie pour améliorer le tourisme.
Tout cela est vraiment positif, seule au tableau, je vous en avais déjà parlé début novembre, l’hôtel Chez Antoine
auquel nous sommes accolées, est en passe de fermer, nous devons donc déménager
au village dès que nos finances nous le permettront.
La route d’Ambodifotatra à Ambatoroa, est maintenant
presque terminée, ce qui va sans doute transformer la vie des villageois à plus
ou moins court terme. Un nouveau taxi-brousse s’est installé qui se nomme
Transport rapide, en plus il est confortable, finies les galères dans des
véhicules pourris et dangereux.
Demain, je vais aller rendre visite à l’hôtel
Soanambo, notre meilleur client sur l’île qui vient de nous faire une nouvelle
commande et j’irai voir aussi mes amis de l’Hôtel Lakana qui nous ont toujours
soutenu dans notre action.
Malgré les difficultés relatives au site, la matière
première, le penja, plus dur à travailler en période de pluie, les artisanes
continuent à produire.
Nous sommes en train d’exploiter une façon de
tisser le penja.
Une nouvelle recrue connaît une technique de macramé
très intéressante pour le raphia.
Nous avons conçu un nouveau rideau, en satrana, pour protéger l’atelier de
la pluie de l’Est, c’est Robine qui l’a réalisé. Du coup, nous avons des commandes de ce modèle, très pratique.
Si la plupart des artisanes travaillent chez elles,
les lundis et les vendredis après-midi, elles doivent impérativement venir à la
micro-école Rouge Beauté de Petite Plage, le vendredi pour les formations et le
lundi pour apporter leurs nouvelles productions et se répartir l’argent gagné à
la boutique dans la semaine. Des formations sont aussi organisées à d’autres
moments.
Comment se calcule de prix des produits et à qui va
l’argent ? À chaque fois qu’une artisane crée un nouvel objet, nous faisons
une fiche de produit comportant la description de l’objet, les matériaux qui le
composent, leur coût et le nombre d’heures de travail à 1000 Ar l’une. À ce
total, on ajoute 20%, 15 pour la vendeuse et 5 pour les menus frais de
l’Association des femmes artisanes, Mena Tsara. Le lundi est donc toujours un
jours plein de promesses.
En ce moment, il y a des ouvriers sur mon toit en satrana car il est plein de trou et
comme c’est la saison des pluies, je vous laisse imaginer les seaux et bassines
qui jonchent le sol de mon bungalow. Là, il y a une petite éclaircie, je fais
sécher les draps et oreillers… Mais bon, je sais que question pluie, je n’ai
rien à envier à ceux d’entres-vous qui habitent dans l’ouest de la France…
Pour en revenir au satrana, c’est un palmier local
dont on utilise les feuilles pour réaliser la plupart des toitures de la région
mais aussi pour l’artisanat. Il y a deux techniques le tressage et le
« macramé ».
Sinon, mauvaises nouvelles, nous n’avons
toujours pas obtenu de compteur, c’est le désespoir !!!! L’installation
électrique est finie depuis longtemps mais…
Mercredi de la semaine prochaine, je pars pour Sainte
Marie via Tana. À très bientôt Rosemarie Martin
Le ciel s’est éclairci à Petite Plage, pluie s’est arrêtée et l’ylang-ylang situé
juste devant ma maison délivre son parfum…
Depuis
quelques jours, des pluies torrentielles se sont abattues sur Mahajanga, nous
les attendions plutôt en février et de moindre intensité. Les habitants des bas
quartiers de la ville ont dû évacuer leur maison.
Les artisanes courageuses sont quand même venues travailler, elles confectionnent
en priorité des rideaux car nous en avons beaucoup vendus pendant les vacances
de Noël.
La
plupart du temps, il y a autant, sinon plus, d’enfants en bas âge que d’adultes
à l’atelier. Au début de mon activité ici, j’avais dans l’idée d’organiser une
crèche, nous l’avions même inscrit dans les projets Rouge Beauté, vu de France,
ça paraissait une très bonne idée, mais, je me suis aperçu au fil du temps que
ce n’était pas dutout adapté. À Madagascar, les enfants sont sevrés très tard,
pendant toute la période d’allaitement maternel, ils sont accrochés à leurs
mamans de façon fusionnelle, dès qu’on les éloigne, ils hurlent, c’est normal,
aucune activité collective n’est donc possible pour ces tous petits.
Une autre bonne idée dont on me parle souvent, travailler avec des matériaux ou
objets de récupération, oui, une belle idée en Europe où nous jetons tout si
facilement mais ici, il n’y a rien à récupérer tout est utilisé jusqu’au bout,
tout est usé jusqu’à la corde.
Un
petit avis à la population qui soutient Rouge Beauté : le Collectif Mada,
ligérien, dont Rouge Beauté fait partie avec 8 autres associations: Avertem, Bokiko, Diego Développement,
Hetsika, Madagascar Solidev, Nosy Mitarika, Tsara Be et Zanaka gèrera un espace
de restauration, le samedi 12 avril 2014 à Mauve lors du festival du
polar, Mauve en noir. Cette activité permettra au Collectif de s’auto financer.
Pour cette soirée, l’aide de 2 personnes supplémentaires est nécessaire, alors,
si vous êtes disponible et si vous avez envie d’aider le collectif, contactez
Vonjy de l’Association Etsika : hetsika@gmail.com,
c’est
l’occasion de passer un bon moment dans une bonne ambiance tout en travaillant
beaucoup.
Puisque
j’aborde le sujet de la recherche de fonds, continuons avec Rouge Beauté. Tous
les ans, il nous faut trouver de nouveaux financements, ce n’est pas le travail
le plus drôle, ni le plus facile à faire. Vous ne le savez peut-être pas mais,
la plupart des grosses entreprises ont une Fondation d’Entreprise, donc, si
vous travaillez ou avez de proches amis qui travaillent au sein d’une telle
entreprise, n’hésitez pas à vous renseigner, en général, ce sont des procédures
simples, donc avis à tous, ensemble, on a plus de chance. Il nous faut préparer
l’an prochain dès aujourd’hui.
L'année dernière, nous avons fait une demande auprès du Rotary Club de Nantes, le
contact a été très bon, nous avons rencontré des gens de grande qualité et
cette année le Club va nous financer des sanitaires, des grilles de sécurité,
du matériel informatique, des machines à coudre… et de la formation. C’est une
belle collaboration entre différents clubs, je vous tiendrai au courant de
l’avancé du projet au fur et à mesure. À bientôt et bonne année 2014 Rosemarie Martin
Les femmes de Tsaramandroso m’ont accueillie très
chaleureusement comme d’habitude.
En Haute Matsiatra, j’encadre donc, deux fois par an,
4 à 6 associations, à Fianarantsoa même, à Tsaramandroso, un quartier éloigné
du centre ville et à Mahasoabe à une vingtaine de kilomètres.
Le voyage pour Mahasoabe, en taxi-brousse local, que
je craignais, s’est avéré très drôle, après quelques petites pannes à l’aller,
au retour, nous avons eu droit à une joute verbale réjouissante entre deux
villageois pleins d’humour et légèrement grisés, il faut le dire, comme tous
les autres passagers revenant du marché de Mahasoabe. J’ai passé un très bon
moment.
Je progresse en malgache, je viens de réaliser que le
champignon, Tay kinina, pour la teinture,
dont je rebats les oreilles à tout le monde, se traduit littéralement
« merde de quinine », en fait, c’est un champignon qui pousse au pied
des eucalyptus et il a bien l’air de son nom mais il est très efficace pour
obtenir des teintes allant du marron clair au noir.
Un seul bémol, sur les Hauts Plateaux, les pluies
torrentielles et orages tous les après-midi.
Je suis de retour Mahajanga, à depuis quinze jours et
n’en bougerai pas avant début mars.Le groupe de femmes Rouge Beauté continu à
s’étoffer suite à une information faite lors d’une réunion de Fokontany, le Fokontany est une subdivision
administrative qui gère un ou plusieurs villages ou un quartier. Les nouvelles
recrues viennent donc essentiellement du village de Petite Plage, là où nous
sommes implantés.
Nous organisons, depuis quelque temps, un concours de
créativité tous les mois, lundi dernier, c’était sur le thème du tissage et des
rideaux, il y a eu 3 lauréates.
En ce jour de Noël, tout est calme, nous craignons un
peu les réactions à l’annonce des résultats électoraux courant janvier...
Ces quinze derniers jours à Mahajanga ont été très
actifs, dès mon retour de Sainte Marie, nous avons reçu, pendant cinq jours,
une dizaine de femmes de la région de Mintsinjo. J'en parlais dans le message
du 6 octobre, en réponse à la demande de 6 associations de femmes de cette Région, nous
allons les aider à transformer artisanalement leur matière première. Le raphia est en
danger d'épuisement mais elles doivent pouvoir garder, voire améliorer, leur pouvoir
d’achat tout en réduisant l’exploitation massive en raison de grosses
commandes pour l’exportation de la part des Indopakistanais et des Grecs.
Ces cinq jours ont été très fructueux, les femmes ont
fait preuve d’une grande curiosité et d’une grande avidité à réaliser de
nouveaux objets. Elles ont appris à tisser, à coudre à la machine, à teindre
les fibres, à agencer les couleurs, à rechercher de nouvelles formes de
corbeilles, à faire des chapeaux en assemblant des tresses…
La rencontre avec
les artisanes Rouge Beauté de Mahajanga a débouché sur de nouvelles créations
pour les unes et les autres.
Les femmes de Mitsinjo avaient ramené des graines
de raphia avec lesquelles nous avons créé des rideaux anti-mouches.
Nous avons
intégré les tresses ajourées à du tissu pour faire des rideaux et trouvé un
nouveau modèle de corbeille en empruntant une technique à l’artisanat du penja. Il y a eu des couacs dont
un affreux tapis de tresse ronde mais, c’est ça la création, il y a des ratés
et c’est important d’en prendre conscience, on ne peut pas avancer sans prendre
de risques.
À terme, les produits des artisanes de Mitsinjo
prendront place dans la boutique Rouge Beauté de Petite Plage.
La semaine dernière, les artisanes de Mahajanga se
sont mesurées pour trouver de nouvelles combinaisons dans la composition des
tresses plates, il y a eu quatre lauréates. Le mois prochain, le concours
portera sur les rideaux.
Un nouveau modèle de sac, en raphia tissé, a vu le jour.
La pluie arrive et heureusement, c’est la sécheresse,
le niveau d’eau du petit lac de Petite Plage a tellement baissé que, pour la
plupart, les poissons sont morts. Avec la pluie, arrivent les letchis de la
côte Est, je me régale.
Depuis dimanche, je suis à Fianarantsoa, le voyage
s’est bien passé, il y avait deux gendarmes dans le taxi-brousse en raison de
la présence de brigands sur le tronçon de la RN7 entre Ambositra et
Ambohimahasoa. Du coup, nous sommes arrivés très tôt car nous avons passé très
vite les innombrables contrôles policiers.
Cet après-midi, je vais aller rendre visite aux femmes
de Tsaramandroso qui travaillent le sisal.
N'hésitez pas à faire des commentaires ou à poser des questions sur ce blog.
Je suis à Sainte Marie. Cette fois-ci, il n’y a pas eu
d’aventures avec Toto, le chauffeur de taxi-brousse car il est en train de
changer son disque d’embrayage. Deux autres taxis-brousse ont pris la relève,
il faut dire le trajet est beaucoup plus facile à effectuer maintenant depuis
que les travaux de la nouvelle route sont bien avancés. Dans quelques mois, la
mauvaise piste ne sera plus qu’un souvenir, bon pour les uns, mauvais pour les
autres. Cette nouvelle route reliant, Ambodifotatra, le chef-lieu de canton, au
nord de l’île où se situe, justement, Rouge Beauté, va changer la vie des
habitants.
Lorsque la crise sociale et politique sera terminée
et que les touristes reviendront, je pense que nous ressentirons sensiblement
les effets de ce désenclavement.
Nous avons, toutefois, un nouveau problème, le petit
hôtel-restaurant local, auquel nous sommes jumelés depuis quatre ans, est en
train de péricliter, il est boudé par tous les professionnels du tourisme,
pourtant, il est bien situé sur la route des «piscines naturelles», à un
kilomètre du bourg. C’est là que je loge. Comme il n’y a pratiquement plus
personne qui s’arrête cela nous fait un gros manque à gagner et à se faire
connaître.
Une des artisanes nouvellement arrivée dans le groupe
nous propose une parcelle de terrain très bien située dans le bourg d’Ambatoroa
où nous pourrions construire un nouveau local, bien plus grand celui-ci,
l’actuel, très vétuste, ne fait que 6m2. Nous allons étudier la
question,ce serait dommage de passer à côté d’une telle occasion
car les terrains libres sont rares sur l’île mais nous ne pouvons pas trop
grignoter sur notre budget de fonctionnement très limité et nous n’avons pas
encore fait de demande de subvention pour ce nouveau projet…
Comme je le disais dans un message du mois de mai,
les festivités de la journée du 8 mars, très prisées à Madagascar, se tiendront
à Ambatoroa cette année, toute l’Île sera là. J’y serai donc, moi aussi, car
Rouge Beauté étant une association de femmes, nous sommes très sollicitées par
les organisateurs notamment la FI.A.MA, Association des femmes malgaches très
active et reconnue. Notre rôle sera primordial dans cette manifestation.
Peut-être qu’en lisant ces propos vous demandez-vous
pourquoi l’Association Rouge Beauté ne travaille-t-elle qu’avec des femmes
artisanes et non des hommes, pourquoi ce choix ? En fait, c’est parce
qu’il y a beaucoup plus à faire auprès de artisanes qui, pour la plupart,
contrairement aux hommes, ne sont pas considérées comme de vraies
professionnelles, on estime qu’elles travaillent à leurs moments perdus, donc
peu importe si les prix de leurs produits sont complètement sous-évalués. Nous
faisons donc tout un travail de revalorisation.
Lors de ma petite soirée de départ à Ambatoroa,
Philomène me faisait remarquer que dans le groupe Rouge Beauté d’Ambatoroa,
plus de la moitié des artisanes sont sans mari, ce qui ne correspond pas dutout
à la réalité sociale du village. C’était la première fois que j’entendais
les femmes aborder ce sujet, j’ai
eu l’impression qu’elles étaient plutôt fières de se débrouiller toutes seules.
Hier, j’ai rencontré, Monsieur Bimba Onezito,
représentant du Ministère de la Population et des Affaires sociales ainsi que
Madame Julienne Rasoazandry, présidente à Sainte Marie de l’Association
FI.A.MA, pour parler du projet de Maison des Artisanes de Sainte Marie à
Ambodifotatra. Ce projet nous tient à cœur depuis longtemps mais il avait été
mis entre parenthèses depuis la mort de Monsieur Bimba père dans un naufrage,
il y a plus d’un an. Comme je l’ai déjà exprimé, les boutiques d’artisanat de
l’Île ne vendent quasiment exclusivement que des produits de grossistes, rien à
voir avec la production locale. Cette Maison des Artisanes, lieu de vente et de
formation serait un outil de valorisation indispensable pour l’artisanat saint-marien.
Décidément, la journée d’hier a été fructueuse car
j’ai trouvé, dans l’après-midi, deux machines à coudre à pédale, Singer,
d’occasion, de très belles machines à coudre. Celles qu’on trouve
habituellement ici ne sont que des copies chinoises, de marque Sincère, ça ne s’invente
pas, et croyez-moi, elles ne le sont pas, sincères, le look y est mais pas la
qualité.
Sinon, nous attendons
les résultats des élections, c’est le calme à Sainte Marie.
Samedi dernier, j’ai
été invitée à un Retournement des morts, Famadihana, dans
le village d’Ambatoroa, c’est un rite funéraire très répandu dans la plupart
des tribus malgaches. Le rituel consiste à déterrer les os des ancêtres, à les
envelopper cérémonieusement dans un lamba,
tissu blanc, et à les promener en dansant autour de la tombe avant de les
réenterrer. À Madagascar, les Famadihana ont
lieu, en général, tous les sept ans et donnent lieu à de grandes festivités
réunissant toute le famille et tous les membres du village.
Je rentre,
aujourd’hui, à Mahajanga avant de repartir dans une quinzaine de jours à
Fianarantsoa.
Je suis à Tana, en partance pour un
séjour de deux semaines à Sainte Marie. Bizarrement, alors que les élections
approchent, c’est pour le 25 de ce mois, les rues me semblent plus sûres, je ne
sens plus les regards des voleurs qui en un clin d’œil évaluent la potentialité
d’un vol imminent sur ma personne. Alors que je m’étonnais de cette situation,
on m’a dit à la réception de l’hôtel où je loge, qu’il y avait beaucoup plus
d’argent à se faire avec la manne de la propagande électorale, il y a plusieurs
meetings chaque jour.
J’ai laissé Rouge Beauté, à Mahajanga, avec un peu de
regret alors que nous avons un beau local et tant de choses à organiser avec la
nouvelle coopérative d’achat. La peinture est terminée, l’installation
électrique est faite, mais il manque encore le compteur et c’est la croix et la
bannière pour en obtenir un, en fait, il n’y en a pas en stock, il faut
attendre un désabonnement. Attendre, toujours attendre… j’ai beaucoup de mal à
m’y faire et c’est pourtant une pratique quotidienne et généralisée pour un
grand nombre de démarches.
Hier, j’ai déjeuné avec Aurélie Razafinjato, à
Antananarivo, une des initiatrices du projet Rouge Beauté, c’est toujours un
plaisir de discuter avec cette femme intelligente, chaleureuse et efficace qui,
depuis longtemps, se bat pour l’engagement des femmes dans la vie sociale et
politique, au sein du VMLF dont elle est présidente nationale. Elle est très
engagée auprès des artisanes de la région de Haute Matsiatra avec laquelle nous
avons une convention.
À Tana, j’ai également rendu visite à l’association
Zanaka, j’y passe, en général à chacun de mes voyages dans la capitale. Zanaka
est une association de la région nantaise qui fait partie, comme Rouge Beauté,
du Collectif Mada. Le collectif Mada regroupe des associations œuvrant pour
Madagascar. L'objectif est de rendre plus efficaces et plus coordonnées les
actions de ces associations menées tant en France qu'ici, à Madagascar.
Me voici revenue donc à Madagascar depuis un mois,
les artisanes de Mahajanga sont ravies de leur nouveau local même s’il reste
encore beaucoup à faire.
Nous venons d’obtenir une aide locale de LPSA
d’environs 2100€ pour la peinture qui est presque terminée maintenant,
l’électricité et les moustiquaires.
L’installation des sanitaires, d’une urgence extrême,
ainsi que les grilles de sécurité font partie, malheureusement, d’une autre
demande de subvention… dont le dénouement est un peu compliqué pour l’instant.
Même si nous avons l’impression d’être dans une
coquille vide, sans équipement, le travail continue. Pour créer un peu
d’émulation nous avons décidé d’organiser un concours, tous les mois, au sein
de l’équipe. La semaine dernière, les "tresseuses" de raphia se sont mesurées sur
la vitesse, la prochaine fois, la compétition portera sur la créativité. Ce
petit exercice m’a, également, permis de mieux mesurer les temps de production,
en effet, les femmes travaillant chez elle, sur leur temps libre entre
l’entretien de la maison, les soins aux enfants et la préparation des repas, il
leur est difficile de bien évaluer la durée de leur travail artisanal et donc
d’en estimer le coût.
Les cours de français continuent.
La semaine dernière, j’ai fait un déplacement de 4 jours dans la région de Mitsinjo, un voyage bien éprouvant mais riche d’enseignement. Mitsinjo est située au sud de Mahajanga, de l’autre côté du fleuve, la Betsiboka, à 80 Kms, c’est-à-dire, 3 heures de piste. Emmanuel Terree, grâce auquel Rouge Beauté a obtenu
une subvention de la Fondation Total, et son épouse Danielle, venus nous rendre
visite, étaient du voyage.
Dans les différents villages (très isolés,
accessibles en charrette à zébus ou à moto…), j’ai donc pu discuter avec les
femmes des diverses associations qui veulent intégrer Rouge Beauté et qui sont
en grande demande de formation.
L'idée pour l’Association locale, Asity, avec qui
j’ai organisé ces visites c’est de ne pas dilapider les ressources naturelles
telles que le raphia en proposant aux femmes de le transformer afin d’obtenir
des revenus plus conséquents. L’idée est belle et simple sur le papier, mais
sur le terrain, il est évident qu’il y a encore beaucoup, beaucoup à faire
avant que les femmes arrivent à vivre de leur production artisanale.
suis passée pas loin du découragement durant ce
périple, mais nous ferons vraiment tout notre possible pour que le projet
fonctionne pour ces femmes. Le prochain rendez-vous est prévu pour la
mi-novembre à Mahajanga, deux femmes de chaque association, donc une douzaine,
vont venir en formation à Rouge Beauté.
L’horreur s’est passée sur l’île de Nocy Be, la foule
a lynché et brûlé, 3 personnes, les mouvements de foules sont implacables et
incontrôlables, ils suivent les rumeurs... C'est monstrueux pour ces personnes
qui se sont faites lyncher. Ce n’est pas la première fois que la foule applique
la justice populaire, on peut lire, régulièrement dans la presse, ce genre d’exaction.
Il y a quelques années, dans un village où je travaille régulièrement, deux
personnes, dont une avait abattu un épicier, ont été lynchées par la population
villageoise, battues à mort pendant deux jours. Je n’ai jamais demandé qui
avait participé à ce lynchage mais il y a certainement des gens avec lesquels
j’ai des relations amicales. Quand j’ai exprimé mon horreur, on m’a
répondu : « Mais que veux-tu qu’on fasse, sinon, ils payent et s’en
sortent comme ça ». Les mots me manquent pour qualifier ce problème de
justice, mais je ne peux m’empêcher de penser au calvaire et à l’épouvante de
ces victimes livrées à une foule haineuse et incontrôlable et je ne peux pas
m’empêcher de penser à l’impact psychologique sur les personnes participant à
ces lynchages, sur les enfants qui étaient là… vivre avec cet acte en soi,
l’assouvissement de cette haine meurtrière collective… Peut-on continuer à
vivre normalement ? Rosemarie Martin