Rouge Beauté œuvre pour le développement de micros-écoles d’arts appliqués à la production artisanale locale réalisée par les femmes à Madagascar. L’Association a choisi comme sites d’activité trois régions : la Haute Matsiatra, la Boeny et l’Analanjirofo pour y dispenser une formation artistique afin de développer la créativité. Son but est de mettre en valeur et de diversifier sensiblement la production artisanale locale afin d’en accroître la diffusion. Rouge Beauté vise l’autonomie financière de ces femmes qui peuvent maintenant produire, dans la durabilité, un artisanat créatif et original au sein de structures légères.

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lundi 30 octobre 2017

Ambatorao, Sainte Marie, penja et raphia


Me voilà arrivée Sainte Marie depuis deux semaines, les débuts ont été difficiles car j'ai été bien malade, le médecin a diagnostiqué une fièvre typhoïde mais je suis vaccinée... En tout cas j'ai dû rester quelques jours de plus en ville, à Ambodifotatra. Pour monter à Ambatorao, je n'ai pas pu y aller en scooter comme d'habitude, j'ai dû prendre un taxi-brousse, il y a longtemps que cela ne m'était pas arrivé à Sainte Marie car maintenant la route est goudronnée donc praticable en vélomoteur. Jocy qui m'a emmenée est un conducteur sérieux et son taxi-brousse est bien entretenu rien à voir avec les véhicules complètement pourris d'il y a quelques années avec leur lot d'aventures épiques mais difficiles à vivre et dangereuses.


C'est donc Philomène, la responsable de Rouge Beauté à Sainte Marie qui a acheminé mon scooter de location à Ambatorao. Heureusement, ce jour-là, il y avait de l'essence à la station T, sinon, les prix sont multipliés par deux. Je viens de passer devant ladite station, il y avait encore un véhicule qui faisait remplir 2 bidons de 125 litres, tous les jours idem... c'est la spéculation... d'après le pompiste, la préfecture ne permettrait plus qu'aux hôteliers et aux pêcheurs de faire des réserves...
De toute façon, en ce moment les prix flambent car nous sommes en période de récolte de la girofle, source de revenu très intéressante pour les Saint-Mariens qui possèdent des plantations. Toute l'Île embaume, les clous de girofle étalés sur des nattes sèchent au soleil. Juste cueillis, ils sont tout gorgés d'eau, verts et rouges.

Mes conditions de logement à Ambatorao ne sont pas encore très bonnes, pour faire faire des économies à l'Association, je dors dans la salle de réunion. À part un lit et une chaise cassée qu'on nous a prêtés, nous n'avons pas encore de meubles. Gentiment,  femmes m'apportent des seaux d'eau pour la cuisine et la toilette. Heureusement, depuis juin, nous avons l'énergie solaire ce qui nous change vraiment la vie et puis, paradoxalement dans ce coin perdu, on capte Internet. Génial !!!! Si mes conditions de vie ne sont pas au top, cela est compensé par la vue sur la mer et les lucioles qui volettent tout autour de mon hamac le soir, c'est tout simplement magique !

Il faut croire que la folie de la girofle avait déteint sur les artisanes d'Ambatorao car les prix étaient plus que fantaisistes à la boutique et la vieille coutume du marchandage était réapparue. Nous avons tout repris à zéro avec des barèmes très simples et très clairs. Nous mettons un point d'honneur à ce que les prix soit fixes et justes, non à la tête du client, c'est l'objet qui a une valeur, le savoir-faire des artisanes.


Leur travail a bien évolué aussi bien en qualité qu'en quantité, il suffit de regarder les photos sur ce blog ou sur notre page Facebook, même si vous n'êtes pas inscrits en cliquant sur le lien, vous pouvez voir les images https://web.facebook.com/rougebeautemadagascar/ 



La nouvelle technique de tresses cousues sur tranches en raphia mais surtout en penja, variété de jonc locale, est très appréciée, nous en faisons des corbeilles, dessous-de-plat, sets de table, tapis, rideaux de porte...
Les abat-jour en penja ajouré, longs ou ronds, sont aussi très prisés.
Nous avons eu beaucoup de visites de touristes de La Réunion en cette période de vacances scolaires. Certains d'entre-eux connaissaient déjà Rouge Beauté par Facebook, d'autres étaient déjà passés à Majunga, cette reconnaissance fait chaud au cœur, tout ce travail depuis huit ans porte ses fruits.




 
Pour être sûr d'être toujours approvisionnées en raphia et en penja, nous avons constitué nos propres plantations depuis quelques mois car nous nous sommes aperçu que les réserves naturelles diminuaient régulièrement et sensiblement. Cette ressource gratuite sur l'Île de Sainte Marie se trouve sur des parcelles privées que n'exploitent pas les propriétaires mais peu à peu, ça change, il se mettent à y cultiver d'autres variétés de plants, riz, patates, manioc, ce qui se comprend. Nous avons donc anticipé.

À propos de riz, j'ai été bien surprise de voir en vente à Ambatorao, des chapelets de petits sachets de riz soufflé coloré, j'espère que la teinture est bien alimentaire, le sachet vaut 100 Ar, ce n'est pas cher mais il est fort à parier que les fabricants se font une bonne marge.

Je repars à Mahajanga cette semaine, j'ai suivi à distance les commandes en cours, c'est vraiment une grande avancée que les femmes sachent maintenant, pour une bonne partie d'entre-elles, naviguer sur Internet, ceci grâce aux formations qu'elles ont suivies.

Avant de partir, j'avais fait deux séances d'information sur la peste qui sévit depuis août, elle a déjà fait 124 morts à ce jour. Il circule bien de rumeurs à ce sujet, certains pensent que c'est une invention du gouvernement pour interdire les rassemblements, d'autre qu'on peut la soigner avec de l'ail et du miel, d'autres encore qu'il faut prendre des antibiotiques avant pour être immunisés... Ce n'est pas la peste bubonique qui effraie le plus car on peux éviter de se retrouver dans des villages ou quartiers infestés par les rats, de plus la période d'incubation donne le temps de voir arriver la maladie et de se soigner. Par contre la peste pulmonaire se transmet par la toux et arrive à son pic maximum en 48h, elle se répand donc rapidement. Les lieux de promiscuité, marchés, transports en communs, rues encombrées, sont nombreux. Les coutumes ancestrales priment sur la peur, certains malades se sachant perdus quittent l'hôpital pour pouvoir être enterrés dans la tradition.
« Pour limiter ce danger, les victimes de la peste ne peuvent être enterrées dans un tombeau susceptible d’être rouvert. Leur corps doit même être scellé dans une sépulture anonyme. En principe. Car ces dernières semaines, la presse malgache a rapporté plusieurs cas d’exhumations clandestines. Mais malgré les risques soulignés par les autorités sanitaires, personne à Madagascar n’ose clairement remettre en cause le culte des morts. Ceux qui le pratiquent, en tout cas, n’envisagent pas un seul instant d’y renoncer. «Je ne veux pas considérer les morts comme des oubliés sous terre. Ils nous ont donné la vie», argumente une adepte des «famadihana», Hélène Raveloharisoa. «Je pratiquerai toujours le retournement des ossements de mes ancêtres, peste ou pas», clame-t-elle, «la peste n’est qu’un mensonge». Pratiquante très traditionaliste, Joséphine Ralisiarisoa va même plus loin. «Le régime en place est à court d’argent pour la prochaine présidentielle [en 2018], alors il invente des choses pour avoir de l’argent des bailleurs de fonds», assène-t-elle. Journal Le Soleil, dimanche 29 octobre 2017
Espérons que tout cela se termine assez vite, certaines compagnies comme Air Seychelles ont cessé leurs vols avec Madagascar. Pour l'instant, l'Île de Sainte Marie ne présente pas de cas de peste, il y en a très peu à Mahajanga ce qui n'empêche pas les touristes d'avoir peur.
À Rouge Beauté, nous sommes prudentes et gardons confiance.
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