Rouge Beauté œuvre pour le développement de micros-écoles d’arts appliqués à la production artisanale locale réalisée par les femmes à Madagascar. L’Association a choisi comme sites d’activité trois régions : la Haute Matsiatra, la Boeny et l’Analanjirofo pour y dispenser une formation artistique afin de développer la créativité. Son but est de mettre en valeur et de diversifier sensiblement la production artisanale locale afin d’en accroître la diffusion. Rouge Beauté vise l’autonomie financière de ces femmes qui peuvent maintenant produire, dans la durabilité, un artisanat créatif et original au sein de structures légères.

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mercredi 9 juin 2021

Raphia, penja, satrana, forona, sisal... fibres naturelles travaillées par les artisanes Rouge Beauté de Mahajanga, Sainte Marie et Fianarantsoa

Depuis la mi-février le variant Sud Africain du Coronavirus sévit à Madagascar, il est arrivé par la côte Nord-Ouest mais maintenant c'est la région d'Antananarivo qui reste la plus touchée. Cette seconde vague a causé beaucoup plus de dégâts que la première. Ce variant est plus contagieux et plus dangereux que le premier. 

Parmi mes amis, plus de la moitié ont eu le Coronavirus dont un cas très grave. À Rouge Beauté Mahajanga, de nombreuses artisanes ont été malades ainsi que des membres de leurs familles avec tous les symptômes de la maladie mais c'est tabou, aucune ne s'est fait dépister, une maman est décédée.

Les chiffres officiels n'ont pas beaucoup de sens si l'on considère le nombre de tests effectués.

Le journal Midi Madagascar dans son édition du 09 avril 2021 rapporte : « Le tableau des cumuls indique un total de 26.475 cas confirmés ; 23.096 guérisons et 149.929 tests réalisés depuis le début de l’épidémie de Covid-19 à Madagascar. »

Le journal Ouest France du 14/01/21 fait état des chiffres communiqués par Le Service Statistique des Ministères Sociaux : « Entre le 1er mars 2020 et le 10 janvier 2021, « on estime qu’environ 40,5 millions de tests RT-PCR et antigéniques ont été réalisés en France » avec « environ 36,4 millions de tests RT-PCR et 4,1 millions de tests antigéniques », a détaillé ce service. » 

Evidemment Madagascar et la France n’ont pas les mêmes moyens et la même infrastructure sanitaire. Ce rappel basique vise seulement à mettre en évidence le gouffre qui existe entre le nombre de tests réalisés depuis le début de la pandémie dans les deux pays plus de 40 000 000 à la mi-janvier 2021 en France contre moins de 150 000 début avril de la même année à Madagascar. Avec si peu de tests, on peut difficilement se fier au nombre de malades annoncé.

Suite à la recrudescence des cas de contamination au coronavirus durant cette deuxième vague le Gouvernement de Madagascar s'est résolu à rejoindre le dispositif Covax depuis fin mars sans pour autant abandonner le Covid Organics, remède local à base de plantes. Début mai, 250000 doses sont arrivées à Madagascar, pour le moment elles sont destinées aux soignants, aux forces de l’ordre et aux personnes âgées. De nouvelles doses sont attendues en septembre. 

Quant au gouvernement français, il a envoyé 6000 doses du vaccin Janssen du laboratoire Johnson & Johnson pour ses ressortissants. Nous sommes 24000 Français à Madagascar, le vaccin est réservé aux plus de 55 ans. J'ai eu un rendez-vous le 1er juin, le problème, c’est que la vaccination a lieu à Tana, j'ai dû louer une voiture et demander une autorisation spéciale pour faire le déplacement car nous étions encore confinés en région et il n’y avait pas de transport en commun, ni bus, ni avion. La situation a changé depuis le 4 juin, la circulation est rétablie, les taxis-brousse peuvent circuler et il y a un avion par semaine entre Antananarivo et Mahajanga, ça me fait un peu peur car il y a encore de nombreux cas dans la capitale même si l'épidémie semble se stabiliser.

À Majunga, nous sommes sur la pente descendante de cette seconde vague depuis trois   semaines, les formations se passent en extérieur mais les masques ont une fâcheuse tendance à glisser…



Revenus des artisanes

Bien évidemment, comme partout, cette épidémie a un fort impact sur les revenus des artisanes, à Sainte Marie et à Fianarantsoa, les femmes sont en grand désarroi, il reste encore un peu d'argent de la cagnotte « Don Covid » que nous avions constituée grâce à la générosité des  adhérents et des organismes qui soutiennent régulièrement nos projets. 

Le tourisme n'est pas près de repartir puisque tous les vols commerciaux venant de l'extérieur sont suspendus jusqu'à nouvel ordre. Heureusement, à Mahajanga, les artisanes arrivent à survivre grâce aux commandes via les réseaux sociaux et au   la livraison à domicile dans tout le pays par un réseau de transporteurs.




La Caisse solidarité maladie fonctionne bien et heureusement, car elle est plus que nécessaire en ce moment.


Depuis janvier, nous avons lancé un grand plan de formation, d'abord les formations techniques :

- Le nattage en point garaba du satrana, palmier local, 

- Le nattage ajouré du raphia

- La teinture du raphia et du satrana

 - Le tissage du raphia

Ces apprentissages se sont déroulés à l'extérieur sauf le tissage étant donné la difficulté à  déplacer les métiers à tisser.

Ces formations sont basées sur le volontariat mais nous avons exigé que chacune des stagiaires, une fois inscrite, s'engage à suivre le cycle jusqu'au bout. De leur côté, les formatrices avaient une obligation de résultat. Pour chacune des techniques apprises, un contrôle des acquis est prévu lors d'un grand concours qui se  déroulera fin juin, les critères de jugement seront : la maitrise du savoir-faire, la finition et la créativité qui doit être au rendez-vous si la technique est bien assimilée.


La Formation Gestion a débuté début mai, elles est destinée prioritairement aux 4 artisanes responsables : de la boutique, de la coopérative d'achat, des commandes et livraisons et de la Caisse de Solidarité Maladie. Le volume d'activité de l'Association s'étant vraiment développé depuis quelques années, nous visons maintenant une gestion et une comptabilité bien spécifique pour chacun de ces 4 postes avec des livres-comptables distincts. Il y a aussi des pratiques à changer. La formation gestion se terminera début juillet.

Comme d'habitude, j'anime la Formation Design toutes les semaines, l'après-midi du lundi, jour où les artisanes apportent leurs nouvelles réalisations.

Toute l'action de Rouge Beauté repose sur le développement de la créativité. C'est l'objectif premier de l'Association, mettre en valeur et diversifier sensiblement la production artisanale locale afin d'en accroître la diffusion. Il suffit de suivre la progression du travail sur ce blog et sur la page FaceBook : https://web.facebook.com/rougebeautemadagascar/ pour constater que la créativité évolue sans cesse.


Alphabétisation et calcul : ces cours se font en tout petits comités, ils ont débuté début février et devraient se poursuivre jusqu'à la fin du mois de juin.

Suite à la demande d'un groupe d'artisanes, nous avons inclus des cours de Français débutant qui se sont terminées fin avril. 

Les formations « Informatiques et accès à Internet », et « Initiation à la photographie » se poursuivrons jusqu'à fin juillet.



À la maison des enfants, nous poursuivons le soutien scolaire et la formation à la pédagogie ludique pour les deux animatrices.

Avec le Covid, les activités sont réduites, pas de voyages en vu mais nous pensons relancer les activités danses, chants, théâtre, sport du mercredi, nous pourrons les mener en extérieur.

Yvonne et les enfants continuent à jardiner, en ce moment ce sont les poivrons qui sont récoltés.

Un nouveau projet en gestation : En avant les filles !!!

L'Association Rouge Beauté créée en octobre 2008 est vouée depuis le début à la cause des femmes. Depuis 2009, elle accompagne des artisanes malgaches, avec l'objectif que ces femmes acquièrent leur autonomie financière, intellectuelle et corporelle.

Les artisanes de Rouge Beauté ont su aussi gérer rapidement l'urgence quand il s'est avéré que des enfants étaient maltraités au sein même du groupe en raison de drames familiaux, en créant Akanin'Ankizy, la Maison des enfants en 2015.

L'Association atteint maintenant un nouveau   palier dans sa réflexion, tout en poursuivant et en développant son action auprès des artisanes. 

Nous avons constaté qu'au sein de la communauté Rouge Beauté, l'égalité des chances entre les filles et les garçons est loin d'être effective. Les filles doivent  abandonner l’école plus souvent que les garçons, à cause du fardeau des tâches ménagères, de l'inquiétude des parents vis-à-vis de l’éducation des filles quant à leur sécurité et à l’absence d’un environnement tenant compte des différences entre sexes.

En cas de difficultés financières, si les parents doivent malheureusement faire un choix, c'est toujours les filles qu'on sacrifie avant leurs frères.

Comme dans de nombreuses sociétés, même si la loi est la même pour tous, il existe à Madagascar des préjugés socioculturels qui tendent à minimiser l’importance de l’éducation des filles. Conformément au poids de la tradition où les filles sont considérées comme ayant un statut inférieur à celui des garçons, elles sont confinées dans leur rôle de futures épouses et de futures mères, ce qui entraîne des grossesses et des mariages précoces. 

L’école apparaît dans ces conditions comme un obstacle en ce qu’elle peut altérer les valeurs de l’éducation traditionnelle, en particulier la soumission attendue de la fille à ses parents et à son futur époux. La peur de l’introduction d’un changement de mentalité des filles amène les parents à écourter la scolarisation de leurs filles.

Bourses d'études

Sans formation réelle, les perspectives d'emploi sont très limitées pour les filles : employées de maison, vendeuses, masseuses, avec la probabilité importante de succomber à la prostitution occasionnelle ou à plein temps, par le mariage non choisi ou le concubinage contraint.

Parmi les enfants des artisanes de Rouge Beauté, des fillettes sont menacées d'abandonner leur scolarité très brillante ou de la poursuivre dans un établissement moins cher mais peu performant. 

Nous avons décidé de créer une bourse d'aide à la scolarité pour les jeunes filles qui ont le désir et la capacité de poursuivre leurs études au collège, au lycée et pourquoi pas d'envisager des études supérieures.

La difficulté de ce projet réside dans le fait qu'il est à long terme et coûteux. Il est nécessaire de suivre ces jeunes filles au moins 4 ou 5 ans, de la 4ème ou 3ème à la terminale, et même envisager qu'elles puissent poursuivre des études supérieures.

Pour l'instant, 3 filles sont directement sont concernées par le projet, elles répondent aux critères de motivation et de capacité scolaire. Leurs parents acceptent cette idée. La détermination des parents est primordiale car pour eux, une fille qui poursuit ses études, c'est d'abord un manque d'aide à la maison mais aussi un manque à gagner quand elle sera en âge de rentrer dans la vie active.

Cette année, elles sont en sixième et en cinquième. Il serait souhaitable qu'elles changent d'établissement en 4ème ou 3ème, pour un collège de niveau scolaire supérieur à celui où elles sont élèves actuellement. Ce changement d'établissement permettra une mise à niveau de leurs connaissances et aptitudes avant d'aborder la classe de seconde qui, on le sait, exigera une adaptation à un nouveau rythme d'acquisition dans le travail scolaire. 

Pour améliorer leur aptitudes, depuis janvier, Rouge Beauté a prêté à chacune un ordinateur et offert des cours d'initiation à l'informatique qui ont lieu tous les mercredis après-midi. Nous envisageons aussi de leur proposer des cours de français, car l'enseignement secondaire et supérieur se fait  en français à Madagascar.

Le village où elles habitent est situé à 15 km de la ville, nous souhaitons leur offrir les meilleures chances pour réussir, en leur proposant soit le pensionnat, soit un transport plus adapté que le bus collectif surchargé et très lent. Pour le budget, ces deux possibilités sont équivalentes car l'essence est très chère  à Madagascar.

Voilà, comme d'habitude, nous cherchons des fonds, nous sommes ouverts à toute idée ou proposition qui permettrait de voir aboutir ce projet.

Le club des battantes

Pour accompagner ce plan, nous souhaitons stimuler une stratégie d’entraide en créant un Club des filles afin que les plus âgées aident leurs « petites sœurs » à continuer leur scolarité en les conseillant, en les aidant à faire leurs devoirs et en encadrant des animations hors scolaire, théâtre, danse, chant, sport, randonnées... club de lecture, discussions... 

Il ne s'agit donc pas simplement d'aider financièrement par une bourse d'étude quelques jeunes filles, mais de leur faire prendre conscience qu'elles font partie d'un groupe qui doit s'entraider,  qu'elles peuvent s'impliquer dans une action solidaire avec leurs soeurs. 

Le problème qui n'est pas spécifique à Madagascar, est que les filles ont plus de difficultés avec la notion de collégialité puisqu'elles restent la plupart du temps à la maison, séparées de leurs semblables alors que leurs frères se forgent naturellement une culture du groupe dans le village. 

Je ne sais pas encore si je vais pouvoir venir en France cet été, j'ai pris un billet sur un vol commercial pour début juillet, retour fin aout, pour l'instant, ces vols sont suspendus...


À suivre...






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